Contamination de l’environnement aux « polluants éternels »

Présents dans de nombreux objets de notre quotidien depuis plus de 80 ans, les PFAS sont quasi indestructibles et de ce fait particulièrement nuisibles.

Des polluants présents partout

Les substances perfluoroalkylées et polyfluoroalkylées (regroupées sous l’acronyme anglais de PFAS ou PFC) sont des substances chimiques très répandues dans notre quotidien. Elles sont utilisées par les industriels depuis la deuxième moitié du XXe siècle dans de nombreux produits à usage domestique, notamment les ustensiles de cuisine anti-adhésion (comme le Téflon), les vêtements techniques (imperméables ou anti-taches), les mousses anti-incendie, les matériaux présents dans les dispositifs médicaux, certains emballages alimentaires, les cires et lubrifiants dans les cosmétiques, les produits phytosanitaires…
Une pollution persistante

polluants éternels PFAS
Les composés perflurorés sont présents dans de nombreux objets du quotidien, comme le Téflon.

Les PFAS contiennent tous des liaisons carbone-fluor très stables, ce qui les rend très peu dégradables. Ils ont la particularité d’être extrêmement résistants et persistants dans l’environnement et dans notre organisme, où ils peuvent s’accumuler. A tel point qu’ils sont surnommés « polluants éternels ».

En raison de leur persistance, de nombreux milieux se trouvent contaminés : l’eau, l’air, les sols et les sédiments, mais aussi les organismes vivants. De ce fait, les PFAS investissent la chaîne alimentaire. Nous sommes donc tous exposés via notre environnement intérieur, notre alimentation et l’eau potable que nous consommons.

Selon l’Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail), les effets sur la santé sont multiples, qu’ils soient avérés ou suspectés : cancers, troubles de la fertilité et du développement des fœtus, interférences avec les systèmes endocrinien et immunitaire…

Des effets sanitaires mal connus

En septembre 2019, Santé Publique France publiait une étude intitulée « Imprégnation de la population française par les composés perfluorés », et destinée à évaluer le niveau d’exposition de la population. D’après l’enquête, l’alimentation (incluant l’eau de boisson) « contribuerait à plus de 90 % de l’exposition totale aux PFC ». L’air intérieur et les poussières domestiques constituent la deuxième source d’imprégnation potentielle, atteignant près de 50 % de l’exposition totale par inhalation ou ingestion involontaire. Enfin, les contacts avec les produits manufacturés via l’absorption cutanée et l’ingestion involontaire (contact main-bouche) concernent plus particulièrement les textiles (en particulier les vêtements de ski qui « contiennent le plus de PFC »).

Les expositions professionnelles sont également observées « dans les usines de production, les métallurgies réalisant du chromage dur, les industries textiles, les sites d’entraînement à la lutte contre les incendies ou encore les sites de traitement des déchets ».

Santé Publique France alertait alors pour la première fois sur une « persistance des composés perfluorés dans l’environnement malgré les restrictions d’utilisation des PFC ». L’institut note d’ailleurs un manque de recul sur l’imprégnation des populations, notamment en France où aucune étude antérieure n’a été réalisée.

À l’étranger, les premières mesures datent seulement du début des années 2000. Malgré une surveillance accrue et un retrait du marché de certains perfluorés, leur danger n’est perçu que depuis peu de temps, faisant craindre un futur scandale sanitaire majeur.

composés perfluorés PFAS
Depuis 2022, les agences de l’eau ont l’obligation de surveiller quatre PFAS dans les eaux de surface et une vingtaine dans les eaux souterraines.

Générations Futures a souhaité quantifier par ailleurs la présence des PFAS dans les eaux superficielles françaises (lacs, étangs, cours d’eau…) pour dresser un état des lieux. L’ONG a analysé 13 000 échantillons en s’appuyant sur la base de données Naïades, qui centralise tous les relevés des agences publiques sur la qualité des eaux. Les résultats indiquent que 4 échantillons sur 10 présentaient au moins un PFAS au-delà de sa limite de quantification.

La contamination semble généralisée, bien que des disparités existent selon les territoires. Par ailleurs, les agences publiques n’ont pas relevé le même nombre d’échantillons d’une région à l’autre, ce qui laisse supposer que les résultats sont « largement sous-estimés » selon Générations futures.

En 2011, l’Anses publiait une première campagne nationale de mesure des composés perfluorés dans les eaux, ainsi qu’un avis en 2017 mais c’est seulement depuis avril 2022 que les agences de l’eau ont l’obligation de surveiller quatre PFAS dans les eaux de surface et une vingtaine dans les eaux souterraines.

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Bientôt interdits en Europe ?

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L’Agence européenne des produits chimiques (ECHA) a été interpellée par 5 pays européens.

Le 17 janvier dernier, le gouvernement a présenté un plan d’actions, en réponse au rapport de Générations Futures, destiné à améliorer la connaissance des niveaux de pollution aux PFAS et des sources de rejet. L’ONG lui reproche toutefois son manque d’ambition : « Les mesures proposées restent très floues et ne contraignent toujours pas les industriels à limiter leurs rejets de PFAS », déclare François Veillerette, porte-parole de Générations Futures.

Des mesures qui reposent en grande partie sur une proposition de restriction au niveau européen, dont les délais de mise en œuvre sont longs.

Néanmoins, la situation pourrait être amenée à changer dans les trois prochaines années. Les autorités sanitaires de cinq pays – Allemagne, Danemark, Pays-Bas, Norvège et Suède – ont interpellé l’Agence européenne des produits chimiques (ECHA) qui a publié le 7 février dernier sa proposition d’interdiction (en anglais).

Deux scenarios sont envisagés : soit accorder aux entreprises un délai de 18 mois pour se passer des PFAS ; soit prévoir une durée de transition variable selon les usages et la disponibilité de substances alternatives (durée pouvant aller jusqu’à 12 ans pour les dispositifs médicaux par exemple).

Dans certains cas, il n’existe pas d’alternative. C’est pourquoi des dérogations illimitées sont envisagées pour des secteurs soumis à des réglementations très spécifiques.

L’objectif serait d’établir une réglementation soumise par la Commission européenne aux États membres en 2025, pour une éventuelle mise en œuvre après 2026.


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