La cueillette de champignons est l’activité automnale par excellence. Mais attention à bien respecter les règles en vigueur et gare aux risques d’intoxication ! Comment bien les choisir et bien les consommer ?
Le champignon n’est ni un végétal, ni un légume ; il s’agit d’une espèce à part entière, classée dans le règne des fongiques. Plusieurs milliers d’espèces existent et de nouvelles sont découvertes chaque année.
La Société mycologique de France en recense plus de 18 000 dans son fichier, mais l’ONF (Office national des forêts) évalue leur nombre à plus de 30 000 en France. L’Alsace en compterait entre 4 000 et 5 000. Les champignons sortent de terre à peu près partout car ils ont besoin de peu pour se développer. L’humidité est bien entendu un facteur de prolifération, c’est pourquoi, après les périodes de pluie, les champignons poussent à foison.
L’avis des spécialistes
Bien que la cueillette soit une activité prisée, elle ne doit pas s’improviser ! Les champignons peuvent être la cause d’intoxications, le plus souvent parce qu’une espèce toxique est confondue avec sa version comestible. C’est pourquoi les mycologues (spécialistes des champignons) recommandent de ne ramasser que les champignons que l’on connait parfaitement.
Au moindre doute, il ne faut pas hésiter à consulter un spécialiste. Les pharmaciens sont théoriquement en mesure d’informer les consommateurs, car ils bénéficient d’un apprentissage en mycologie durant leur cursus. Généralement, ces derniers connaissent au moins les champignons dangereux et mortels de leur région. Mais il peut arriver que certains ne souhaitent pas endosser cette responsabilité.
Par ailleurs, de nombreuses associations de mycologie sont implantées sur notre territoire, telles que la Société mycologique de Strasbourg (SMS), la Société mycologique du Haut-Rhin (SMHR) ou la Société lorraine de mycologie.
Pour permettre son identification, la totalité du champignon doit être prélevée (pied et chapeau). Il est déconseillé d’utiliser des applications de reconnaissance de champignons qui peuvent être source d’erreurs.
Cueillette : les bons réflexes
Pour minimiser les risques, d’autres précautions sont à prendre :
- Éviter les lieux de cueillettes à proximité de sites pollués (bord de routes, aires industrielles, décharges…). Les champignons, composés à plus de 80 % d’eau, sont de véritables « éponges », et accumulent énormément les composés toxiques ;
- Arracher le champignon entier (ne pas le couper) ;
- Ramasser les champignons de taille adulte. Laisser les petits et ceux trop abîmés ;
- Séparer les champignons récoltés et les trier par espèce (pour se protéger de toute contamination en cas de présence d’un champignon vénéneux) ;
- En cas de doute, même après identification, jeter le champignon (voire toute la récolte s’il a été en contact avec les autres) ;
- Utiliser un panier ou une cagette pour la récolte (et non un sac plastique, qui accélère le pourrissement) ;
- Se laver les mains soigneusement après la cueillette ;
- Conserver les champignons au réfrigérateur et les consommer dans les deux jours ;
- Consommer les champignons en quantité raisonnable (150 à 200 g par semaine et par adulte) et bien cuits (20 à 30 minutes à la poêle ou 15 minutes à l’eau bouillante, en jetant l’eau de cuisson). Ne les manger crus en aucun cas ;
- Prendre les champignons en photo avant de les cuisiner (utile en cas d’intoxication) ;
- Ne jamais les laisser à la portée des jeunes enfants.
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Activité réglementée
Contrairement à ce que l’on pourrait penser, la cueillette sauvage des champignons n’est pas complétement libre. Ainsi, la cueillette est interdite sans l’autorisation du propriétaire du terrain. Elle sera considérée comme du vol, même en l’absence de clôture ou d’un panneau d’avertissement (en effet, l’article 547 du Code civil dispose que « les fruits naturels (…) de la terre (…) appartiennent au propriétaire par droit d’accession »).
Concernant les bois et les forêts, les champignons relèvent du régime forestier. Si bien qu’un ramassage est toléré dès lors qu’il n’excède pas 5 litres (5 kilos) et qu’il est effectué en vue d’une consommation familiale. Au-delà, le contrevenant encourt une amende entre 750 € et 45 000 €, ainsi qu’une peine d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à 3 ans, selon le volume ramassé (Articles R163-5 et L163-11 du Code forestier).
Si le prélèvement excède 10 litres et est commis en réunion et/ou avec destruction ou dégradation des lieux, les peines sont assimilables au vol aggravé (articles 311-4 et 311-4-1 du Code pénal).
En ce qui concerne la vente, une autorisation de l’ONF (Office national des forêts) ou de la mairie est nécessaire (sauf pour le propriétaire du terrain lui-même). S’agissant d’une activité réglementée, le commerce de champignons n’est autorisé que pour les personnes déclarées et donc inscrites au registre du commerce et des sociétés (par exemple en auto-entreprise pour un particulier). L’activité est donc soumise à l’impôt.
Si toutes les conditions sont remplies, le vendeur de champignons peut utiliser les canaux suivants : restaurants, coopératives, marchés, Internet.
Aucune notion en mycologie ne semble exigée, pourtant il est essentiel d’approfondir ses connaissances auprès de mycologues, pour éliminer tout risque de confusion. La plupart des associations propose des sorties guidées et des cours d’initiation.
Enfin, la cueillette de champignons peut être réglementée par arrêté préfectoral. Dans certains cas, la cueillette sera alors soit interdite, soit autorisée sous conditions (une partie du territoire, une période déterminée, une liste des espèces ou une quantité maximale pouvant être ramassées…). Il convient donc de se renseigner en amont auprès de la mairie ou de la préfecture du lieu de ramassage. L’arrêté préfectoral s’applique également au propriétaire du sol.
Le choix dans le commerce
Si vous n’êtes pas adepte de la cueillette sauvage, ou que vous ne souhaitez pas vous aventurer en terrain méconnu, les champignons se trouvent également en bonne quantité dans les magasins, de la petite épicerie aux grandes et moyennes surfaces en passant par les marchés.
Certaines espèces parmi les plus courantes (champignons de Paris, pleurotes, oreilles de Judas, shiitakés, etc.) sont cultivées. Les autres sont récoltées à l’état sauvage et donc soumis à la saisonnalité. Ainsi, les morilles se trouvent au printemps tandis que les cèpes, les pieds de mouton et les trompettes de la mort poussent plutôt à l’automne.
L’indication de la provenance est facultative, il est donc parfois difficile de savoir ce que nous achetons. Néanmoins, les commerçants sont soumis à des obligations en termes d’étiquetage. Les espèces communes sont souvent présentées en mélange mais leur nom doit apparaître sur l’emballage.
Lorsqu’un produit comporte plusieurs espèces, chacune d’elle doit être mentionnée par ordre décroissant d’importance. Lorsque de nombreuses espèces cohabitent, les professionnels utilisent souvent les termes « mélange forestier », « garniture forestière » ou « cocktail forestier ». Toutefois ces dénominations concernent des produits ne comportant que 50 % de champignons sauvages…
Pour être sûr de consommer un produit composé à 100 % de champignons sauvages, il faut se tourner vers les mentions « garnitures de champignons sylvestres » ou « cocktail de champignons sylvestres ».
Gare aux intoxications
Si les champignons frais vendus en magasin ne présentent aucun risque sanitaire, attention cependant à leur état de fraîcheur au moment de l’achat. Ces produits fragiles peuvent subir des dégradations à force d’être manipulés ou s’ils sont stockés trop longtemps. C’est pourquoi il faut veiller à n’acheter que des champignons sans altérations visibles.
De même une fois rentré au domicile, ils doivent être consommés rapidement car ils se détériorent vite. S’ils changent de couleur, ont une chair molle, deviennent poisseux et/ou dégagent une odeur de pourriture, ils sont impropres à la consommation et peuvent provoquer une intoxication alimentaire (le plus souvent bénigne).
Néanmoins, en cas de symptômes (diarrhées, vomissements, nausées, tremblements, vertiges, troubles de la vue…) à la suite d’une consommation de champignons de cueillette, ou même achetés dans le commerce, il faut contacter le « 15 » ou un centre antipoison. Il en existe huit à travers la France ; dans le Grand Est, l’antenne se trouve à Nancy (N° d’urgence 24/24, 7 jours/7 : 03 83 22 50 50), mais le Centre Antipoison et de Toxicovigilance de Strasbourg reste joignable au 03 88 37 37 37.
Pour faciliter le travail des toxicologues, il faut idéalement pouvoir présenter des photos des champignons consommés, indiquer les heures des derniers repas ainsi que l’heure où les premiers symptômes sont apparus et conserver les restes pour que des analyses soient réalisées.