« Origine France », « Fabriqué en France », drapeau tricolore sur les emballages et autres cocardes. La confusion règne dans les rayons. Comment s’y retrouver pour acheter vraiment du « made in France » ?
1. Le Made in France au rayon alimentaire
Les consommateurs sont de plus en plus sensibles à la provenance des denrées alimentaires qu’ils achètent, notamment à « l’origine France ». Ils sont nombreux à vouloir privilégier le local et la production française, ce qui n’échappe pas aux as du marketing.
C’est ainsi que des symboles tels que le drapeau tricolore ou la carte de France apparaissent régulièrement sur les produits sans que cela soit toujours bien justifié. Par exemple, un jambon cuisiné en France mais dont la viande est en provenance d’Espagne pouvait afficher jusqu’à présent un symbole français.
Origine française pour 50% du produit
Cela n’est plus possible désormais. En effet, la loi n° 2021-1357 du 18 octobre 2021, dite loi EGAlim 2, interdit « tout symbole représentatif de la France » sur les emballages alimentaires lorsque les ingrédients primaires ne sont pas d’origine française. Un ingrédient primaire désigne l’ingrédient entrant pour 50 % ou plus dans la composition d’une denrée ou le/les ingrédients qui sont habituellement associés à la dénomination de cette denrée par le consommateur (article 2, paragraphe 2, point q du règlement européen concernant l’information des consommateurs sur les denrées alimentaires de 2011).
Aussi, l’apposition d’un drapeau français, d’une carte de France ou d’un coq sur ce type de produits est considérée aujourd’hui comme une pratique commerciale trompeuse au regard de l’article L. 121-4 du code de la consommation
Des dérogations prévues au « Made in France »
L’ONG Foodwatch, fortement mobilisée pour la suppression de ces symboles abusifs, se félicite de cette décision mais regrette toutefois que les sénateurs aient ajouté une dérogation « pour les matières premières qui ne peuvent pas être produites en France (comme le café ou le cacao) ou dont la production en France est trop faible ». Un café en provenance du Guatemala, mais torréfié en France, pourra continuer d’arborer un macaron tricolore.
Difficile aujourd’hui de connaître l’ensemble des denrées concernées par cette dérogation. Cela dépendra de ce que les pouvoirs publics entendront par filières « dont la production est manifestement insuffisante sur le territoire ».
Les modalités d’application seront définies prochainement par décret. Il faut donc patienter encore un peu avant de voir disparaître les couleurs bleu-blanc-rouge des emballages…
Flou demeurant dans le discours marketing
Par ailleurs, les industriels de l’agroalimentaire sont toujours autorisés à utiliser le mot « France » dans leur discours marketing. Les mentions « cuisiné en France » ou « transformé en France » pourront toujours être apposées, à partir du moment où elles sont utilisées de façon juste et loyale et où aucun symbole tricolore n’apparaît sur l’emballage.
2. Made in France pour les produits manufacturés
En Europe, la mention de l’origine du produit est facultative pour les biens de consommation et d’équipement (dits produits manufacturés), contrairement à certains produits agricoles, alimentaires et cosmétiques.
Quelle réglementation ?
Les fabricants sont donc libres d’indiquer ou non l’origine de leurs produits. En revanche, les mentions « fabriqué en France » et « made in France » sont soumises au respect des règles d’origine non préférentielle du Code des douanes de l’Union européenne.
Aussi, un produit manufacturé portant une de ces deux mentions doit obligatoirement :
- Tirer une part significative de sa valeur d’une ou plusieurs étapes de fabrication localisées en France
- Avoir subi sa dernière transformation substantielle en France.
La DGCCRF (Répression des fraudes) indique par ailleurs que « le professionnel doit être en mesure de la justifier [la mention] et cette allégation ne doit pas induire le consommateur en erreur ».
Méfiance donc face aux allégations du type « conçu », « designé », « pensé », « marque française », « né en France »… qui n’offrent aucune garantie sur l’endroit où le produit a été fabriqué.
Nouveau logo « Fabriqué en France »
A la suite du renforcement de la réglementation, et dans le but affiché d’unifier les pratiques, France Industrie, l’organisation professionnelle qui représente l’industrie nationale, a mis au point un nouveau logo, lancé à l’occasion du salon du Made in France le 11 novembre 2021. L’objectif est de permettre au consommateur de repérer rapidement, en magasin et sur Internet, les produits fabriqués en France.
Mais d’après l’association UFC-Que Choisir, « les critères pour pouvoir utiliser le logo ne vont pas au-delà de la réglementation ». Or, les règles sur l’origine et la nomenclature douanière diffèrent selon les familles de produits. Par ailleurs, les fabricants et distributeurs pourront utiliser ce logo sans avoir besoin de donner des gages de fabrication française. France Industrie ne procèdera en effet à aucun contrôle… Pourtant, les abus en termes de « Made in France » sont courants et ce nouveau logo risque de ne pas vraiment apporter l’éclairage que les consommateurs auraient pu attendre d’une telle démarche.
L’association de consommateurs informe néanmoins qu’un nouveau service devrait voir le jour sur le site de France Industrie. Il permettra aux professionnels d’alerter les douanes ou la DGCCRF en cas de soupçon de « franco-lavage » de la part d’un concurrent (pratique consistant à faire passer un produit fabriqué à l’étranger pour du Made in France). Le service sera également accessible aux consommateurs. A ce jour, rien n’a encore été publié.
Quels contrôles ?
En France, les contrôles sont assurés par deux organismes, à deux niveaux différents : d’une part lors de l’importation par la Direction générale des douanes et droits indirects (DGDDI), d’autre part lors de la commercialisation par la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF).
3. « Made in France » pour les végétaux aussi
Les consommateurs commencent à se familiariser avec les labels et appellations concernant l’alimentation (agriculture biologique, commerce équitable, label rouge, AOP/AOC…). Mais des labels existent également pour les fleurs et les plantes, et ils sont beaucoup moins connus.
Les labels « Fleur de France » et « Plante bleue »
Quelque 85 % des fleurs vendues en France sont cultivées à l’étranger : aux Pays-Bas, mais également dans les pays d’Afrique et d’Amérique du Sud (Kenya, Éthiopie, Équateur, Colombie, Costa-Rica), où les conditions climatiques sont plus propices à la floriculture et la main d’œuvre bien moins onéreuse.
Pourtant, les Français sont aussi de plus en plus soucieux de la provenance des végétaux qu’ils se procurent. Val’hor, l’interprofession française de l’horticulture, de la fleuristerie et du paysage, qui représente 52 000 entreprises, met à la disposition du secteur plusieurs labels qui renseignent le consommateur sur la qualité et l’origine des produits.
À titre d’exemple, le label « Fleur de France » garantit que les fleurs achetées ont été cultivées dans l’Hexagone.
D’autres certifications existent, allant souvent de pair avec ce premier label. Ainsi, « Plante bleue » distingue les producteurs qui respectent un cahier des charges destiné à limiter les impacts environnementaux en utilisant moins d’eau, moins de pesticides et moins d’engrais. Le célèbre Label rouge s’applique aussi aux végétaux, valorisant les fleurs et plantes plus belles ou qui durent plus longtemps. Quant au label Fairtrade/Max Havelaar, il garantit des fleurs issues du commerce équitable.
D’après le site de Val’hor, 49 % des ventes des grossistes en végétaux d’extérieur et 41 % des ventes en plantes fleuries sont d’origine française.
Oubliez les roses à la Saint Valentin !
Enfin, depuis cinq ans, une nouvelle marque, « Fleurs d’ici », met en lien les producteurs, les fleuristes et les consommateurs sur le marché français. Elle se présente comme une marque de « fleurs éthiques, 100 % française », locales et de saison.
Elle ne saurait donc concerner le traditionnel bouquet de roses rouges offert à la Saint Valentin, puisque ces fleurs ne poussent en France qu’au printemps… l’occasion de découvrir d’autres variétés tout aussi belles !
4. Les autres labels valorisant l’origine française des produits
Diverses initiatives (facultatives, gratuites ou payantes) ont été mises en place par des organismes privés, tels que des associations de professionnels pour mettre en avant l’origine France des produits. Parmi elles, certaines s’appuient sur un cahier des charges bien défini et font l’objet de contrôles réguliers afin d’apporter une réelle garantie au consommateur. Les plus courantes sont :
- Les indications géographiques : elles concernent les produits manufacturés, artisanaux et les ressources naturelles. Homologuées par l’Inpi (l’Institut national de la propriété industrielle), elles sont composées d’un nom de produit associé à celui d’une zone géographique (par exemple la dentelle de Calais).
- Le label Entreprise du Patrimoine Vivant : cette reconnaissance de l’État distingue les entreprises aux savoir-faire artisanaux et industriels d’excellence. Créée en 2005, elle vise à éviter la disparition des talents français d’exception qu’ils soient d’ordre économique ou culturel.
- Origine France Garantie : cette certification est émise par l’association Pro France, créée en 2010 à l’initiative d’Yves Jégo, à la suite de la publication de son rapport consacré à la marque France. Elle porte aussi bien sur des produits alimentaires que non alimentaires, dès lors qu’au moins 50 % du prix de revient unitaire du produit est acquis en France et que le produit puise ses caractéristiques essentielles en France.
- France Terre Textile : ce label récompense les articles textiles dont plus des trois quarts des opérations de production sont réalisées en France selon des critères de fabrication en circuit court, de qualité et de RSE (Responsabilité sociétale des entreprises*). Il est implanté dans 5 des 7 territoires français de tradition textile : Vosges, Alsace, Nord, Auvergne Rhône-Alpes et Troyes-Champagne.
* Intégration volontaire par les entreprises de préoccupations sociales et environnementales à leurs activités commerciales et leurs relations avec les parties prenantes. C’est donc une démarche individuelle et volontaire pour contribuer aux enjeux du développement durable.