Une enquête du journal Marianne révèle que de nombreuses communes rurales, sujettes aux déserts médicaux, favorisent l’installation et l’exercice de pseudo-praticiens, bien que les autorités de santé alertent sur les risques encourus par les patients.
Les pratiques de soins dites non conventionnelles (PSNC), également appelées « médecines alternatives », « naturelles » ou « douces », regroupent des activités diverses telles que la naturopathie, la réflexologie, la kinésiologie, la biorésonance, le magnétisme, le reiki, l’iridologie…
3,4 médecins pour 1 000 habitants
En 2022, la DGCCRF avait relevé un taux d’anomalie de 66 % auprès des 381 établissements contrôlés, en particulier des manquements relevant d’une méconnaissance de la réglementation mais aussi des allégations parfois dangereuses. Certaines pratiques entraînent également un risque de dérives sectaires auxquelles la Miviludes (Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires) reste attentive.
Pourtant, ce secteur est loin de connaître la crise, contrairement à la médecine conventionnelle. En effet, à l’heure où le nombre moyen de médecins généralistes est de 3,4 pour 1 000 habitants, les maisons de santé accueillant des praticiens de médecines alternatives se multiplient, en particulier dans les zones rurales.
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Une cohabitation hors la loi
Dans certaines communes, ces pseudo-praticiens côtoient des soignants dans des maisons de santé financées à hauteur de plusieurs milliers (voire millions) d’euros par l’État et les collectivités locales (région, départements et communes).
Ces infrastructures sont destinées en premier lieu à attirer des médecins qui auront alors la possibilité de travailler en groupe.
Et bien que les généralistes, infirmiers, kinés, ORL ou encore psychiatres s’emparent de ces lieux, ils ne sont pas suffisamment nombreux pour remplir les cabinets créés, ce qui poussent les villes à recourir à d’autres praticiens non-conventionnels qui prennent alors les places restantes.
Or, la DGS (Direction générale de la santé), rappelle que « le Code de la santé publique indique que seuls des professionnels médicaux et auxiliaires médicaux peuvent faire partie des maisons de santé et centres de santé ».
Le but est d’éviter que la présence de médecins « serve de caution et entretienne une certaine confusion sur leur champ d’exercice ».
Mais il est difficile de tout contrôler et le Président de la section exercice professionnel du Conseil national de l’ordre des médecins, René Labarrière, en appelle au devoir des médecins de déclarer les situations auxquelles ils sont confrontés.
De son côté, la DGS répond qu’une communication à destination du grand public, des professionnels de santé et des collectivités est en cours d’élaboration pour sensibiliser à ces dérives et aux risques liés aux recours à ces pratiques « dès lors qu’elles font état d’allégations thérapeutiques ».
Pallier le manque de médecins
Si Mathieu Repiquet, du collectif NoFakeMed*, dénonce le charlatanisme sous-jacent de ces pratiques, il reconnaît également l’impuissance des communes : « les mairies ne recherchent pas des pseudo-thérapeutes, mais simplement des solutions pour leur population » pour faire face au manque de médecins.
D’autres se demandent au contraire si la proximité de ces médecines alternatives avec des professionnels de santé ne permettrait pas de limiter les dégâts. La population se tournant volontiers vers les médecines douces, ces dernières mériteraient d’être mieux encadrées.
Le journal rappelle en conclusion de son enquête qu’à ce jour, aucun recensement de ces professionnels n’existe et que nous ne savons pas combien exercent aux côtés de professionnels de santé tout en bénéficiant d’argent public…
*Groupe de professionnels de santé indépendants qui milite pour informer le grand public sur la dangerosité des fausses médecines (« fake med »)