Les pratiques de soins dites non conventionnelles (PSNC), également appelées « médecines alternatives », « naturelles » ou « douces » sont de plus en plus en vogue. Mais elles ne sont pas reconnues sur le plan scientifique et font l’objet de contrôles.
Effets de la crise sanitaire
La crise sanitaire a généré un renforcement du recours aux médecines dites « non conventionnelles ». D’après une enquête de la DGCCRF (Répression des fraudes), 40 % des Français rechercheraient des traitements alternatifs.
Mais ce secteur suscite des inquiétudes car les personnes se tournant vers ces médecines sont souvent vulnérables : elles consultent dans une période de mal-être ou sont confrontées à un problème que la médecine conventionnelle ne leur semble pas pouvoir résoudre.
C’est pourquoi, après une première enquête menée en 2018, la DGCCRF a procédé à de nouveaux contrôles entre octobre 2020 et septembre 2021.
Une cinquantaine de spécialités
En quatre ans, le nombre de spécialités s’est accru. Le champ des investigations a donc été élargi par rapport à la précédente enquête. Ainsi, ce sont une cinquantaine de disciplines qui ont été contrôlées, de la naturopathie ou la réflexologie, à des techniques moins connues telles que celles pratiquées par les guérisseurs Reiki ou celles revendiquant une action sur les ondes ou les flux d’énergie (« access bars », thérapie quantique, « biorésonance », « géobiologie », magnétisme…).
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Risque de confusion
La Répression des fraudes a relevé un taux d’anomalie de 66 %, presque équivalent à celui constaté en 2018 mais avec un nombre de pratiques plus élevé. La majorité des manquements les moins graves révèle une méconnaissance de la réglementation.
Certains professionnels sont installés dans des lieux de santé et utilisent les mêmes codes médicaux, ce qui est source de confusion pour le consommateur. La DGCCRF note également que le référencement de ces praticiens dans des annuaires dédiés au domaine médical ou paramédical entretient cette confusion quant au contenu et à la finalité non thérapeutique de leurs prestations.
D’ailleurs, certains semblent nourrir le flou dans leur communication, utilisant des termes en rapport avec la santé, bien qu’ils aient conscience de ne pas appartenir au milieu médical. Pourtant, le Code de la consommation condamne l’utilisation de termes faux ou ambigus (« sont réputées trompeuses, au sens des articles L. 121-2 et L. 121-3, les pratiques commerciales qui ont pour objet : […] 16° D’affirmer faussement qu’un produit ou une prestation de services est de nature à guérir des maladies, des dysfonctionnements ou des malformations »).
Des allégations parfois dangereuses
Plus inquiétant, la Répression des fraudes a constaté que des discours prônaient l’abandon des soins traditionnels. Certaines allégations iraient même jusqu’à prétendre guérir des pathologies comme le cancer, le sida ou la dépression. Des pratiques d’autant plus graves qu’elles peuvent entraîner « une perte de chance d’amélioration ou de guérison des personnes malades de pathologies lourdes susceptibles de se détourner de leurs traitements médicaux ».
Les deux tiers des infractions concernent des pratiques commerciales trompeuses. La DGCCRF a effectué des signalements pour exercice illégal de la médecine et usurpation de titre aux autorités compétentes. Elle a également transmis un dossier sur le recueil abusif de données personnelles à caractère médical à la Cnil (Commission Nationale Informatique et Libertés).
Enfin, avec la crise sanitaire, certains praticiens proposent des séances à distance, via des photos ou application, ce qui pose question s’agissant de techniques ayant recours en théorie au toucher (comme le Reiki ou la réflexologie)
Au total, sur 381 établissements contrôlés, la DGCCRF a délivré 189 avertissements, 55 injonctions et dressé 17 procès-verbaux.
Les centres de formation aussi dans le viseur
La DGCCRF se montre particulièrement vigilante à l’égard des formations axées sur l’apprentissage de ces disciplines. Les tarifs et durées sont très variables. Certaines bénéficient de financements publics, ce qui confère une crédibilité aux enseignements et aux « diplômes », sans que ceux-ci soient reconnus par ailleurs.
Ces centres n’informent pas sur les obligations issues notamment du droit de la consommation ou du code la santé publique, particulièrement quant aux risques d’exercice illégal de professions de santé ou d’usurpation de titres. Or, la Répression des fraudes a constaté l’utilisation d’allégations thérapeutiques (strictement interdites) ainsi que la distribution d’un modèle de publicité aux élèves comportant ce type d’allégations et les incitant à l’utiliser.
Concernant les « diplômes » ou certificats délivrés, les centres de formation recourent abusivement à des formulations du type : formations « diplômantes » ou « certifiantes ». Enfin, la plupart des futurs professionnels s’endettent pour se former et/ou financer la licence, très coûteuse et à renouveler annuellement, leur permettant d’exercer. Sans compter les nombreux stages de perfectionnement payants qui égrainent leur parcours pour acquérir des « niveaux » supérieurs de pratique.
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